Seriez-vous intéressé si quelqu’un vous disait qu’il existe un ensemble de pratiques simples qui aident à gérer tous les aspects de la vie quotidienne, tout en élevant le potentiel humain à un niveau qui dépasse l’imagination la plus folle? Cela attiserait pour le moins la curiosité de la plupart des gens.

En fait, cela correspond précisément à la description des pratiques du yoga, mais rares sont ceux qui s’en rendent compte. Le yoga comprend un ensemble holistique de pratiques qui visent au développement personnel et au bien-être du corps, de l’esprit et de l’âme. Il y a quelques milliers d’années, le grand sage Patanjali a répertorié les pratiques yogiques en vigueur en son temps et les a présentées dans un traité en huit étapes, qu’on utilise encore aujourd’hui. Il s’agit de l’ashtanga yoga.

Mais les pratiques du yoga ont évolué depuis Patanjali, surtout au cours des 150 dernières années, pour répondre aux besoins de l’époque. Dans cette série d’articles, KAMLESH PATEL décrit chaque étape du yoga à la lumière des pratiques yogiques modernes de Heartfulness. Il nous montre comment concilier nos pratiques spirituelles intérieures et la vie dans le monde, et comment affiner notre personnalité pour parvenir au véritable état du yoga – c’est-à-dire à l’efficacité dans l’action et à l’harmonisation des aspects spirituel et matériel de la vie.

A S A N A

Asana est la troisième des huit étapes de la pratique du yoga de Patanjali. KAMLESH PATEL nous montre que le rôle d’asana est de nous procurer une stabilité physique nous permettant d’établir une stabilité intérieure; la science yogique d’asana aide des gens du monde entier à prendre soin de leur santé et de leur bien-être.

Cette troisième étape de l’ashtanga yoga de Patanjali est probablement la plus populaire aujourd’hui, mais aussi la moins bien comprise. En pensant aux asanas, beaucoup d’entre nous visualisent des exercices de hatha yoga à la salle de gymnastique ou de yoga locale, mais il y a là bien plus à comprendre. Le mot «asana» vient de la racine sanscrite as, qui signifie «s’asseoir»: à l’origine, asana était la posture assise pour méditer. Le but du yoga ayant toujours été l’union ou l’unité avec l’infini, l’objectif principal de cette pratique est donc la méditation et, à travers elle, l’union. C’est dans ce contexte que Patanjali définit et décrit la pratique d’asana dans les trois sutras suivants:

2.46: Sthira sukham asanam

Sthira signifie «stable, constant»; sukham signifie «confortable, détendu»; asanam signifie «la posture ou la position assise». Asana est donc une position assise stable et confortable.

2.47: Prayatna shaithilya ananta samapattibhyam

Prayatna signifie «tension ou effort»; shaithilya signifie «relâcher ou détendre»; ananta signifie «infini, sans fin»; samapattibhyam signifie «porter son attention sur et fusionner avec». Asana consiste donc à relâcher les tensions, et à laisser la conscience fusionner avec l’infini.

2.48: Tatah dwandwa anabhighata

Tatah signifie «ainsi»; dwandwa signifie «la dualité ou les paires d’opposés», tels que la lumière et l’obscurité, le bien et le mal; anabhighata signifie «sans impact ou libre de la souffrance». Asana nous libère ainsi de l’impact des dualités de la chaleur et du froid, du plaisir et de la douleur, etc.

En résumé, voilà ce que nous dit Patanjali de la pratique d’asana: trouvez une position assise stable et confortable, afin de pouvoir relâcher vos tensions et laisser votre conscience fusionner avec l’infini, et vous serez libéré de l’impact des dualités de l’existence. Tel est le but d’asana.

Swami Vivekananda a apporté d’autres précisions sur le rôle d’asana: pour votre méditation quotidienne, trouvez une posture dans laquelle vous pouvez rester longtemps. Ce devrait être une posture facile, et pas nécessairement la même pour tous. Ce qui importe, c’est que cette posture laisse le flux des énergies circuler dans le système. Dans son livre Raja Yoga, Vivekananda explique

qu’une activité importante se déroule dans le corps lorsque nous méditons: «Certains courants nerveux doivent être déplacés et dirigés dans un circuit nouveau. De nouvelles sortes de vibrations apparaissent et toute la constitution est, en quelque sorte, refondue. Mais la partie essentielle de l’activité a pour siège la colonne vertébrale, si bien que la seule chose nécessaire pour la position adoptée est que la colonne vertébrale soit libre, droite, et que la poitrine, le cou et la tête soient en ligne droite, dans le prolongement l’un de l’autre. Que tout le corps soit soutenu par les côtes et vous aurez une posture naturelle et facile, la colonne vertébrale droite.»(1)

(1) Coffret Raja Yoga. Histoire et tradition, vol. 5, pp. 27-28

Il s’agit peut-être là de la toute première description de la neuroplasticité résultant de la méditation. Vivekananda a situé ce processus de neuroplasticité non seulement dans le cerveau, mais aussi dans le système nerveux central, en particulier dans la moelle épinière, de la poitrine à la tête et au cerveau, c’est-à-dire dans les régions qui comprennent les chakras du cœur et du mental.

Vivekananda nous a également indiqué la façon de maintenir cet alignement de la colonne vertébrale et du cerveau: «Dites-vous que vous êtes fermement assis et que rien ne peut vous ébranler. Puis passez lentement en revue la perfection de votre corps, de la tête aux pieds. Pensez qu’il est pur comme du cristal, et qu’il est un vaisseau parfait pour naviguer sur l’océan de la vie.»(2) L’essentiel est de laisser le corps libre, en maintenant la poitrine, les épaules et la tête droites, de façon à ne plus du tout sentir son corps. Quand on va au-delà du physique, on perd tout sens du corps, du plaisir et de la douleur. Ensuite on se sent tellement reposé! C’est le repos le plus parfait qu’on puisse donner au corps.

(2) Ibid., p. 186

On considère souvent que les meilleures postures pour la méditation sont celles où l’on a les jambes croisées, avec les deux mains reposant sur les cuisses, comme siddha-asana et padmasana, la position du lotus. Ram Chandra de Shahjahanpur a expliqué la philosophie qui sous-tend la position des jambes croisées: si par la méditation nous devons retourner à notre origine en contractant notre existence jusqu’au néant, il est utile d’adopter une position physique similaire de contraction ou de retrait.

«De par sa tendance à s’élever, la contraction commence toujours par le bas, pour graduellement monter. Pour s’élever, on doit donc commencer par contracter le bas. Cela ne peut se faire qu’en ramenant les jambes et le reste du corps dans une certaine position et en la maintenant. Quelle que soit la posture adoptée, elle jouera finalement le rôle d’un asana. Cet élément est essentiel, parce qu’il prépare notre chemin vers l’Ultime. La posture doit toujours être la même. En agissant ainsi on s’associe à la grande force, la chose même dont on se sert dès le départ pour atteindre son objectif. Ainsi la forme qui est associée à la Réalité offre-t-elle une grande aide au premier stade de l’initiation.

La pratique de sandhya, assis, le dos bien droit, a été considérée comme la posture la plus avantageuse depuis des temps très anciens. Dans cette position, le flux de la grâce divine descend directement sur le chercheur. S’il est légèrement affaissé, penché ou dans une position instable, le courant de splendeur risque d’être bloqué ou gêné. Pour bénéficier pleinement de la descente du courant, le chercheur devra s’asseoir dans une position correcte et stable.»(3)

(3) Coffret Raja Yoga. Histoire et tradition, vol. 6, p. 154

On considère souvent
que les meilleures postures
pour la méditation sont celles
où l’on a les jambes croisées,
avec les deux mains reposant
sur les cuisses, comme
siddha-asana et padmasana,
la position du lotus.

Siddhasana

Mais la position assise alignée ne nous aide pas seulement à recevoir le flux de la grâce divine. Cette posture stable et confortable a aussi une incidence sur notre bien-être physique. Nos têtes sont lourdes – même lorsqu’elles sont en équilibre sur le cou, elles pèsent environ 5 kilos. Or que se passe-t-il lorsque, profondément absorbés dans une méditation accompagnée de transmission, nous perdons conscience? Parfois notre tête tombe en avant jusqu’à toucher notre poitrine, et dans cette position elle peut exercer une traction allant jusqu’à 27 kilos sur le cou et les épaules. Imaginez l’effet, au bout d’un certain temps, sur le dos, le cou et le système nerveux central! Il importe donc de rester droit, stable, équilibré et détendu quand on médite.

Garder la tête en équilibre sur le cou et les épaules pendant la méditation requiert une conscience forte. Pour l’acquérir, il nous faut méditer. Tout est donc interconnecté – le physique, le mental et le spirituel. Même pour rester dans un asana stable et confortable tout au long d’une méditation, nous devons aiguiser notre conscience.

En méditant pour atteindre l’état d’unité avec Dieu, les anciens rishis découvrirent rapidement qu’il fallait aussi prendre soin du corps et l’exercer. Comme le fait de rester constamment assis en méditation n’était pas bon pour leur santé, ils trouvèrent d’autres postures qu’ils pouvaient adopter au cours de la journée sans sortir de leur état méditatif. Ils demeuraient ainsi en méditation tout en améliorant leur système immunitaire, leur respiration, leur circulation sanguine, leur tonus musculaire et leur souplesse articulaire. C’est ainsi que se développèrent les pratiques physiques du hatha yoga.

Mais s’agit-il simplement d’exercices physiques? Le légendaire maître de yoga B.K.S. Iyengar a dit un jour: «Vous devez pratiquer l’asana avec votre âme. Comment le faire avec l’âme? Ce n’est possible qu’avec l’organe du corps le plus proche de l’âme – le cœur. Un asana accompli vient donc du cœur et non de la tête. Car il ne s’agit pas seulement de le faire, mais d’y être. Beaucoup de gens s’efforcent de penser à la façon de pratiquer un asana, alors qu’il faut y pénétrer par le ressenti, avec amour et dévotion.»

Les asanas sont efficaces lorsque le cœur, le mental et le corps travaillent à l’unisson. Chaque mouvement est effectué lentement, avec une conscience intensifiée de ce qui se passe. Si les asanas sont pratiqués dans un esprit méditatif, ils apporteront de nombreux bienfaits, et pas seulement sur le plan physique.

Les asanas maintiennent la souplesse des vertèbres de la colonne vertébrale, ce qui est important pour se mouvoir correctement; c’est la clé de la plasticité générale du corps. Selon la terminologie yogique, cela permet la libre circulation de l’énergie le long de la colonne vertébrale. Et que faisons-nous de cette énergie qui s’écoule librement? Elle est attirée à l’intérieur avec pratyahara, la cinquième étape de Patanjali. Les asanas étirent et tonifient les fascias, ce tissu conjonctif qui se trouve partout dans le corps. Les fascias maintiennent les muscles ensemble à la bonne place, les séparent pour qu’ils fonctionnent indépendamment les uns des autres et fournissent une surface lubrifiée leur permettant de se mouvoir en douceur.

Le domaine du hatha yoga continue de s’ étendre et de se développer, et on enseigne aujourd’hui quantité d’asanas. En voici sept parmi les plus courants, avec quelques bienfaits qu’ils offrent pour la santé, juste pour vous donner une idée de la façon dont la science yogique des asanas s’est développée:

En méditant pour atteindre l’état d’unité avec Dieu,
les anciens rishis découvrirent rapidement qu’il fallait aussi
prendre soin du corps et l’exercer. Comme le fait de rester
constamment assis en méditation n’était pas bon pour leur santé,
ils trouvèrent d’autres postures qu’ils pouvaient adopter
au cours de la journée sans sortir de leur état méditatif.

1. Tadasana favorise l’étirement général et la circulation sanguine. Il soulage les douleurs aux genoux, les dépôts de calcium, tels les éperons calcanéens, et les crampes. Il améliore l’équilibre physique et mental. Il est aussi bénéfique dans les cas d’Alzheimer et d’autres formes de démence.

Tadasana

2. Veerabhadrasana est bon pour le cou, les épaules et les maux de dos. Il favorise également l’expansion de la poitrine, et aide en cas d’asthme et de cancer (en élevant le niveau d’oxygène). Il renforce la confiance.

Veerabhadrasana

3. Parsva Uthanasana aide à la digestion et améliore la flexibilité du dos et des muscles ischio-jambiers. Il apporte le calme et un objectif.

Parsva Uthanasana

4. Dvipada Pitham aide à gérer la pression artérielle, qu’elle soit haute ou basse. Il soulage également les maux de tête et tonifie le dos, les genoux, les épaules et les muscles des mollets. Il renforce l’équilibre et la confiance.

Dvipada Pitham

5. Jataraparivritti travail le sur le système digestif et élimine les impuretés du corps.

Jataraparivritti

6. Mahamudra ouvre la région pelvienne, et favorise la santé reproductive. Il soutient la concentration et calme l’esprit. Il est excellent pour les femmes enceintes.

Mahamudra

7. Suryanamaskar aide à gérer le diabète et les problèmes de thyroïde. Il apporte de la confiance et active tout le système nerveux.

Suryanamaskar

La principale chose à retenir est que l’ashtanga yoga forme un tout. Il n’a pas été conçu pour que nous choisissions à volonté l’une ou l’autre des huit étapes. Pour vraiment bénéficier des asanas, il faut que l’âme, le cœur et le mental soient profondément impliqués. Vous pouvez commencer n’importe où, mais si votre désir de croître est sincère, le reste finira par suivre.

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